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Photo du rédacteurZolnichka

La dévotion perdue de Baba Yaga

Dernière mise à jour : 30 mai

À qui les racines lyriques du peuple russe ne parleraient pas, Baba Yaga est la figure autoritaire et dissimulée de la protection du foyer. Cadre aimant et sécurisant, c’est aussi le lieu des premières justices et injustices. Cliquez ici pour avoir accès au conte complet 📖


(c’est très rapide à lire)


Cette histoire est inspirée d’une scène réelle



Paris est la ville du mouvement, de la connexion dans l’indifférence complète et du paraître de la morale. Entre bureaux d’associations solidaires, cafés éthiques, boutiques bio, la vie, la vraie, semble hors sol.


Les cadres rythment les aiguilles de leurs anciennes montres désormais connectées au son de leurs pas affirmés. Les femmes avancent comme des funambules sur un câble goudronné, les yeux fixés sur un horizon inexistant et la tête dans un nuage masqué par une musique distrayante. Les uns comme les autres, s’évitent habilement. Les espaces communs n’auront jamais été remplis d’autant de solitaires. La ville n’aura jamais été à ce point dispensée de sens et de vie.


Dans cette coulée grise de béton froid, les Hommes n’ont jamais été aussi apprêtés, et la morale n’aura jamais eu autant de parures qu’à cet instant. La société n’a jamais été aussi obsédée par le bien, tout comme le bateau du pêcheur égaré se languit de la côte à l’approche de l’échéance de son voyage. Depuis quand nous sommes-nous autant éloignés de nous ou de vous ?


La Baba Yaga n’existe plus dans l’espace public. Elle est devenue l’ermite pudique qui ne s’épanouit plus dans sa vocation. Entre inexistence et aliénation, la mère et l’âme maternelle s’éteignent sur nos pavés.


Dans une des tours qui ornent les dalles de ciment, une femme de l’âge d’une mère s’égare. Nue.

Un sac en plastique à la main, les cheveux aussi débroussaillés que les jeunes parents d’un nourrisson, elle se dirige vers un de ce qu’elle considèrerait comme un congénère. Les pieds traînant sur le sol, le regard las ou simplement vide, qu’a pu bien devenir le foyer qu’elle souhaitait protéger ?


La force de la sorcière, qui autrefois dialoguait et négociait avec les montagnes, le vent et le feu se retrouve incapable de passer un mot à un égal. Qui est le vampire qui aurait ainsi détourné une énergie si magique.


La réponse réside dans nos propres travers. Entre individualisme exacerbé, sentiments feints et liberté déraisonnable, le foyer n’est plus comme avant. Telle une voyageuse du temps, cette inconnue qui autrefois tourmentait les femmes et les hommes d’une sagesse violente ne devient que la folle dépourvue de destin.


Baba Yaga, puissance du foyer, sorcière et tortionnaire, force de la nature et de l’ésotérisme devient, par notre propre modèle, folie et désuétude. Celle dont le nom faisait trembler les bouleaux blancs, aujourd’hui est tu et fait rire les passants.


Baba Yaga n’est plus, et ne reviendra pas de si tôt. Bafouée, humiliée pour ne pas avoir pu perpétuer sa quête, elle emmène avec elle le foyer qu’elle protégeait et la rudesse de la vie qu’elle nous apprenait.


Confort et ressources surpassent justesse et autorité.

La Morale se détourne d’elle-même pour se tourner vers le paraître de son nom.



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